Cet ouvrage réunit en deux volumes (bilingues) les textes inédits
d'une trentaine d'auteurs aux horizons multiples. Son dessein primitif est
d'ordre libertaire. Il vise à exorciser le mythe imposteur qui fait de Géricault
un séquestré de l'histoire : un pur produit contre nature de l'idéal
classique et de la morale bourgeoise, bref un peintre ...académique !
Ce vrai scandale qui a son origine dans un livre-culte, la
biographie puritaine de Charles Clément (1867), se perpétue depuis
lors au mépris des oeuvres et des textes. Non qu'il s'agisse en l'espèce
de troquer un credo pour un autre. Ce livre n'est pas un exercice gratuit d'érudition
positive, mais un effort massif de réflexion critique, étayée
sur ces vertus cardinales de la post-modernité, la différence et
la dissémination. Aussi ne prétend-il aucunement fonder un savoir
(douteux) sur des certitudes (illusoires). Ces pages substantielles campent un
artiste réfractaire au discours réducteur de la vérité
: un Géricault versatile, plurivoque et même contradictoire. Un Géricault
en miettes, aurait dit Nietzsche, prophète du fragment. Le temps
des grands récits, doctoraux alibis de la science et du pouvoir, est
aujourd'hui révolu. Et l'histoire de l'art, cet avatar fâcheux de
l'historicisme allemand, est bien finie : elle ne fut jamais qu'une histoire des
artistes, grevée d'apories par la crise du sujet (la nouvelle de
l'auteur). Ainsi commence une ère nouvelle, que cet ouvrage espère
favoriser : l'ère de l'interprétation.